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10/04/2015
Théoriquement, depuis la loi de séparation de l'Église et de l'État de 1905, la puissance publique n'a pas trop à se préocupper des lieux de cultes.
Tout était encore clair, il y a une vingtaine d'années. Mais dans un pays autrefois très majoritairement catholique, l'entretien des innombrables églises pose maintenant problème aux municipalités, tandis que l'émergence d'une pratique musulmane importante met en évidence un manque de mosquées. Le tout dans une atmosphère sociale, disons tendue. Éclairages à travers le rapport du sénateur Hervé Maurey (au passage, cela nous permet de rappeler que lorsque les sénateurs ou les députés sont absents de leur hémicycle, ils ne sont pas forcément en train de se tourner les pouces).
On compte en 2015 environ 45 000 églises catholiques, 4 000 temples protestants, 2 450 mosquées, 420 synagogues, 380 lieux de culte bouddhistes et 150 églises orthodoxes.
Religion catholique : la religion catholique demeure aujourd'hui majoritaire, malgré un net recul ces dernières décennies. La France compte aujourd'hui 26,5 millions de catholiques déclarés et 3,2 millions de catholiques pratiquants.
Culte protestant : cette communauté religieuse représenterait entre 2,5 et 3 % de la population française. Soit entre 1,6 et 2 millions de fidèles.
On compte environ 4 000 lieux de culte protestants en France. Parmi ceux-ci, le ministère de l'Intérieur en dénombre 1 400 se rattachant aux Églises luthériennes et réformées, et 2 600 affiliés aux Églises évangéliques.
Religion juive : la France compte, selon les estimations des représentants de la communauté juive, entre 500 000 et 600 000 juifs, dont 60 % vivraient en Ile-de-France.
Chrétiens orthodoxes : les chrétiens orthodoxes, installés en France depuis le XIXe siècle, représentent environ 500 000 fidèles. On dénombre 130 lieux de culte orthodoxes sur le territoire national.
Bouddhistes : la France compte aujourd'hui environ 1 million de bouddhistes, dont les deux tiers sont d'origine asiatique. On évalue actuellement à près de 380 le nombre de pagodes et de lieux de culte bouddhistes sur le territoire national.
Musulmans : la France compte entre 2,1 millions et 5 millions de personnes se réclamant de l'islam, ce qui fait de cette religion la deuxième de notre pays. Le ministère de l'Intérieur estime à environ 2 millions le nombre de pratiquants. Les musulmans de France se réclament à 98 % d'un islam sunnite.
L'Observatoire du patrimoine religieux (OPR) donne une moyenne de vingt à trente mosquées par département. Si la France comptait 1 600 mosquées en 2004, elle en compte aujourd'hui 2 450 « surtout situées dans les grands bassins de population et majoritairement en région parisienne (459 mosquées), puis en région lyonnaise (319) et autour de Marseille (218)
Comme l'explique Chems-eddine Hafiz, vice-président du CFCM : « si l'on considère qu'il y a 1,5 million de pratiquants, et que chaque pratiquant a besoin d'environ un mètre carré pour prier, il faudrait plus d'un million de mètres carrés de lieux de prière. Or, la France compte seulement 300 000 mètres carrés ».
Depuis la loi de 1905, les lieux de culte catholique ne sont plus la propriété de l'Église. La plupart des édifices du culte construits avant 1905, dont l'immense majorité relève du culte catholique, sont la propriété des communes et appartiennent à leur domaine public. Les édifices du culte acquis ou construits après 1905 sont la propriété de personnes privées, généralement des associations cultuelles ou des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.
Sur 45 000 édifices, on en dénombre 40 000 qui appartiennent aux communes et 5 000 aux diocèses. Par ailleurs, 87 cathédrales sont propriété de l'État.
Une situation autrefois satisfaisante, mais qui bute désormais sur 2 décalages ; le décalage entre le nombre et la taille des lieux de culte et le nombre de paroissiens qui diminue dans les zones rurales, et le décalage entre le nombre de pratiquants catholiques et musulmans et le nombre de lieux de culte respectifs.
De ce fait, le nombre important d'églises, dont l'entretien est à la charge des communes ne correspond plus forcément avec les possibilités financières de ces dernières. Selon l'Observatoire du patrimoine religieux, 10 % des édifices seraient dans un état grave et nécessiteraient des travaux d'urgence, et plus de 30 % seraient dans un état préoccupant et nécessiteraient des travaux à moyen terme.
Les lieux de culte catholique sont ceux qui demandent les plus gros financements en raison des dépenses d’entretien. Ces dépenses pèsent lourd dans les budgets des communes et constituent une exception à la règle d’interdiction de financement public des lieux de culte. En effet, depuis 1907, les églises sont intégrées au patrimoine communal et doivent être entretenues par les communes.
Il ressort des résultats que les demandes de financement de lieux de culte concernent très majoritairement le culte catholique (48 %) et finalement très peu les autres religions : musulmane (3 %), protestante (3 %), évangélique (1 %), juive (1 %). Cela s'explique, de façon logique, par la très forte présence dans nos territoires d'édifices du culte catholique.
Cathédrale Sainte-Marie(doc. Yalta Production)
Mais ces édifices religieux constituent surtout, pour nombre de nos territoires, un patrimoine culturel à préserver. Le ministère de la Culture indique que « les bâtiments religieux, dont les églises paroissiales catholiques représentent la plus grosse part, forment 34 % du patrimoine immobilier protégé au titre des monuments historiques en France, soit plus de 14 000 édifices, ou parties d'édifices, classés ou inscrits.
Les besoins en nouveaux lieux de culte concernent essentiellement les religions émergentes en France : les églises évangéliques et orthodoxes, l’islam, le bouddhisme. Si la religion catholique dispose, pour des raisons historiques évidentes, de nombreux lieux de culte, les communautés musulmanes, bouddhistes, orthodoxes et protestantes évangéliques sont aujourd'hui en recherche de lieux de culte, soit à construire lorsqu'elles en ont les moyens, soit par la location de salles.
Culte musulman : le rapport met en évidence la volonté de la communauté musulmane de construire des mosquées de proximité plutôt que des "mosquées cathédrales". Il montre également que les financements des lieux de culte musulmans par des États étrangers sont minoritaires. L’essentiel du financement est assuré par les dons des fidèles.
Eglises évangéliques : le nombre des évangéliques progresse rapidement sur tout le territoire, notamment en Ile-de-France. Les protestants évangéliques constatent une augmentation de la fréquentation des édifices existants dans les zones urbaines mais regrettent un « manque de place » et expriment « un fort besoin de mise à disposition de nouveaux lieux de culte ». Ils déplorent « les difficultés à obtenir des permis de construire de la part des maires » et les « tracasseries administratives » auxquelles ils sont confrontés. Malgré ces obstacles à l'implantation, les évangéliques reconnaissent qu'« une église locale naît tous les dix jours, soit environ 35 églises supplémentaires par an ».
La loi du 9 décembre 1905 affirme que la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte, et supprime en conséquence toutes les dépenses relatives aux cultes des budgets de l'État, des départements et des communes. L'interdit ainsi exprimé s'applique tout particulièrement au financement des lieux de culte.
Mais c'est seulement en 1946 que la nouvelle Constitution affirme dans son article 1er que « La France est une République laïque ». La Constitution du 4 octobre 1958 reprend cette disposition et la complète en affirmant, dans son article 1er, que la France est une République laïque, qu'elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d'origine, de race ou de religion, et qu'elle respecte toutes les croyances.
Enfin, la jurisprudence stipule l'interdiction de principe, pour les collectivités territoriales, de financer la construction ou l'acquisition d'édifices cultuels, des dépenses de fonctionnement courant, de favoriser un culte à travers la mise à disposition de locaux ou de financer des célébrations religieuses même d'intérêt local.
Départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle : le régime concordataire entré en vigueur en France avec la loi du 8 avril 1802 est resté applicable jusqu'aujourd'hui et le service du culte en Alsace-Moselle est donc un service public. Dès lors, les établissements publics du culte sont sous la tutelle de l'État et gèrent et entretiennent les biens appartenant aux cultes, leurs décisions étant d'ailleurs soumises au contrôle du juge administratif.
Culte mulsulman : contrairement à une idée reçue, les financements des États étrangers dirigés vers des lieux de culte musulmans en France ne représentent qu'une part minoritaire du financement total des cultes, assurés en majorité par les dons des fidèles, ces derniers étant toutefois beaucoup plus difficilement contrôlables.
Financement des nouveaux lieux par les collectivités locales
Les collectivités locales peuvent soutenir indirectement la construction de nouveaux lieux de culte.
Les collectivités territoriales peuvent octroyer des garanties d'emprunts bancaires dans les agglomérations en développement pour soutenir la construction d'un édifice du culte.
Le bail emphytéotique conclu avec un groupe religieux pour l'édification d'un édifice cultuel est une pratique privilégiée par les collectivités territoriales. Le bail emphytéotique est un contrat de long terme conclu sur le domaine privé ou public de la collectivité territoriale.
Un local public peut être mis temporairement à disposition pour l'exercice d'un culte.
D'une manière générales, les élus ne sont pas partisans d'une installation de nouveaux lieux de culte (suffisant en rouge).
Le nombre de lieux de culte est-il suffisant(doc. Senat)
Dans l'ambiance délétère actuelle, les arrière-pensées portent bien entendu sur la création de nouvelles mosquées dans les communes.